;-) clin d'oeil en rébus aux anciens apothicaires
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jeudi, octobre 21, 2010

15/10/10
(JIM)
Dr Julie Perrot

Mauvaise herbe
Se soigner par des herbes médicinales est une habitude largement répandue dans le monde, notamment parce que les utilisateurs de ces herbes les croient inoffensives. Nombre de publications ont pourtant donné l'alerte sur les effets sanitaires indésirables et la toxicité de certaines d'entre elles. Une nouvelle mise en garde vient de Taiwan, où la médecine traditionnelle chinoise est largement pratiquée, depuis des siècles, et où plusieurs travaux ont (ainsi qu'en Europe) associé à la consommation d'herbes contenant de l'acide aristolochique - AAL (chez les femmes en particulier, qui les avaient utilisées pour maigrir, pour leurs effetx diurétique et laxatif) un risque accru d'insuffisance rénale et de carcinomes urothéliaux. Les rares études menées en milieu professionnel suggérant, chez les médecins pratiquant la médecine traditionnelle et chez les herboristes, en Chine, un accroissement de la mortalité par cancer des voies urinaires, du risque d'insuffisance rénale et de l'incidence des cancers urologiques, c'est à la relation entre exposition professionnelle aux herbes médicinales contenant de l'AAL et risque d'insuffisance rénale chronique (IRC) chez les herboristes que se sont intéressées cette fois des équipes taiwanaises.

Elles ont pour ce faire mené une étude cas-témoins, nichée dans une cohorte professionnelle nationale, celle des herboristes chinois affiliés à leur Syndicat national entre le 1er janvier 1985 et le 31 décembre 1998. L'étude a inclus 6 538 herboristes et croisé les données d'exposition avec celles de la base de données du Bureau d'Assurance maladie (couvrant 97 % de la population taiwanaise). Les cas incidents d'IRC survenus de 1995 à 2000 ont été inclus, l'IRC étant définie par une altération irréversible de la fonction rénale avec clairance de la créatinine inférieure à 5 ml/min ou créatininémie atteignant ou dépassant 10 mg/dl imposant l'hémodialyse répétée.

Des entretiens en tête-à-tête ont permis de préciser les données socio-démographiques, les antécédents médicaux personnels et familiaux (notamment de lithiase urinaire, d'insuffisance rénale, de cancer de la vessie ou du rein), la fréquence de consommation d'antalgiques, ainsi que le statut tabagique, les habitudes alimentaires et de boissons (consommation de thé, de café, d'aliments fermentés et fumés), et la consommation d'herbes médicinales. L'exposition professionnelle aux herbes médicinales, à celles contenant de l'AAL, a été détaillée (historique professionnel, ancienneté dans le métier, tâches effectuées : cueillette, manipulation, préparation, vente, distribution et vente d'herbes provenant de Chine, pouvant être contaminées aussi par des métaux lourds, durée quotidienne de travail, habitation ou non sur le lieu de travail...), ainsi que les expositions à d'autres toxiques environnementaux (solvants organiques, peintures, pesticides plus de six mois durant ; consommation d'eau de puits, exposant à l'arsenic, entre autres).

L'étude a porté sur 40 cas (70 % de femmes ; âge médian : 50,8 ans) et 98 témoins (66,3 % de femmes ; médiane d'âge : 52,9 ans) indemnes de défaillance rénale, appariés aux cas pour le sexe et l'année de naissance à 5 ans près, les deux groupes ne différant pas significativement en termes de niveau d'éducation, de type d'herboristerie, d'années passées à préparer ou vendre des herbes médicinales, de tâches effectuées et d'horaires journaliers de travail.

Après ajustements, l'analyse associe au risque d'IRC :

- les activités de préparation et vente d'herbes médicinales contenant de l'AAL (OR = 3,43 ; IC à 95 % 1,16-10,19) ;
- les activités de distribution ou vente de ces herbes (4,17 ; 1,36-12,81) ;
- le fait d'habiter dans l'herboristerie (3,14 ; 1,11-8,84) ;
- les antécédents de consommation, fréquente ou occasionnelle, de ces herbes (5,42 ; 1,18-24,96).

H-Y Yang et coll rappellent que diverses herbes médicinales, des espèces Aristolochia, Bragantia et Asarum notamment, contiennent de l'acide aristolochique, et insistent sur la nécessité de confirmer ces résultats par des études complémentaires, sur de plus grands échantillons. Ils recommandent une surveillance médicale des herboristes, et la mise en oeuvre de programmes d'information sur les risques associés à l'exposition à certaines herbes médicinales et à leur consommation.
Yang H-Y et coll. : Occupational kidney disease among Chinese herbalists exposed to herbs containing aristolochic acids. Occup Environ Med, Publication avancée en ligne, 8 octobre 2010 (doi : 10.1136/oem.2010.058594.

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